À travers une tribune libre, l’ancien député, OURO-AKPO Tchagnao, actuel président du mouvement Lumière pour le Développement dans la Paix (LDP) porte un regard critique sur les discours du chef de l’État, Faure Gnassingbé au forum Chine-Afrique (FOCAC 2024) et à l’assemblée générale des Nations Unies.
Lire la tribune.

Encore une déclaration dithyrambique de Faure Gnassingbé à l’ONU.
« Pour regarder l’avenir, il faut regarder l’Afrique ». N’est-ce pas le contraire M le président, à voir ce qui se passe au Togo et en Afrique où le rêve des jeunes, c’est de quitter leur pays au risque de leur vie ?
Depuis quelque temps, le chef de l’État togolais est devenu le chantre des déclarations dithyrambiques, de plus en plus théoriques et presque à la limite du paradoxe avec la réalité et la pratique sur le terrain.
En effet, que ce soit à Séoul en Corée du Sud, en marge du premier sommet Corée du Sud-Afrique du 4 juin 2024, à l’occasion d’une visite au centre de l’ONG IYF, il n’a pas hésité à indexer les conséquences des actes de la jeunesse de la sous-région ouest africaine, qui selon lui “ne réfléchit pas avant d’agir”. En suite à Pékin lors du sommet du FOCAC 2024, là encore il n’est pas passé par le dos de la cuillère, à la limite d’un cours magistral pour présenter les travers de la gouvernance mondiale. Cependant, il n’a pas tardé à exprimer un satisfecit pour la réussite de son propre modèle de gouvernance. À l’écouter, il s’est plutôt glorifié du passage de la 4e république à la 5e république au Togo, sans pour autant expliquer l’esprit et les conditions qui ont présidé la rédaction et l’adoptation de la nouvelle république sans le consentement exprimé du peuple.
De même, le 25 septembre dernier, à l’occasion de la 79e session de l’assemblée générale des nations unies, M Faure Gnassingbé à cette tribune n’a pas changé son discours devenu habituel. C’est sans aucune hésitation qu’il a abordé la problématique des différentes crises mondiales en indexant la faillite des institutions du système des nations unies.
Cette posture de Faure Gnassingbé nous rappelle celle de son père, Gnassingbé Eyadema en 1972, lors de la visite à Lomé du président français Georges Pompidou. A cette occasion le président togolais à l’époque n’a pas manqué de déclarer devant le président français que, “l’indépendance acquise par les peuples africains n’est que politique. Pour le développement de l’Afrique, il faut une indépendance économique”. Une allusion faite à la pratique du franc CFA.
Un an après, à la suite du contre coup du 2ème choc pétrolier, le Togo va bénéficier du renchérissement des cours du phosphate sur le marché international. Avec des flux financiers presque inattendus, Eyadema Gnassingbé n’a pas fait mieux que de se lancer, avec les conseils d’un économiste français du nom de Maurice Assor, dans des investissements gigantesques sous le couvert de la politique des grands travaux. Il s’agit d’un ensemble de projets très mal conçus et très mal gérés qui sont devenus par la suite, ce que l’on a appelé les éléphants blancs. On peut citer, les usines de togotex et togofruit à Kara, la raffinerie de pétrole, la Société Nationale de Sidérurgie ( SNS), la centrale thermique de LOMÉ qui devrait fournir l’énergie électrique à SNS à un coût de 52 f le Kwh, alors qu’ au même moment, le Ghana fournissait le Kwh à 1 f à la C E B ; sans oublier les huileries d’Agou et d’Alokoegbé. Tous ces mégaprojets dont l’investissement a coûté plusieurs centaines de milliards ont fait faillite, certains avant même de démarrer. Ce qui a poussé le pays au bord de l’asphyxie économique et l’a amené à solliciter l’intervention des institutions de Brettons Wood pour un Programme d’Ajustement Structurel (PAS) en 1982. Comme quoi, entre la déclaration et la vision, il faut les compétences, c’est-à-dire, des hommes et femmes capables d’utiliser leur intelligence et leur compétence pour valoriser les ressources nationales afin de répondre aux besoins des populations.
Un proverbe de chez nous dit que, “ les cris des chasseurs ne percent jamais la peau du gibier”. On se souvient qu’avant Faure Gnassingbé, son ministre des affaires étrangères Robert Dussey l’avait déjà précédé à la tribune de la 78e session de l’assemblée générale des nations unies le 23 septembre 2023 avec presque les mêmes déclarations assaisonnées de tout un paquet de « nous sommes fatigués ».
A la 79e session de cette même assemblée générale des Nations unies, M Faure Gnassingbé, et dans la même vaine que son ministre des affaires étrangères, a lancé un appel à des réponses globales face aux défis actuels notamment alimentaire, sécuritaire ou écologique et un nouveau modèle de coopération internationale. Pour lui, les institutions du système des nations unies sont devenues inadaptées et désuètes face aux défis contemporains.
La question que l’on peut se poser est celle-ci : qu’est ce qui n’a pas marchés depuis le discours de Robert Dussey et bien d’autres personnalités africaines pas des moindres, avant Robert Dussey, tels que le maréchal Mobutu du Zaïre, le guide libyen Muammar Kadhafi, Robert Mugabé du Zimbabwé, le sénégalais Abdoulaye Wade et bien d’autres chefs d’État africains qui se sont exprimés avec plus de véhémence à cette tribune contre cette injustice systémique ?
Pour nous, tout se passe comme si nos dirigeants africains n’ont pas compris jusqu’ici le conseille de l’écrivain nigérian Wole Soyinka à Kampala en Ouganda en 1962 à l’endroit des jérémiades des chantres de la négritude. Pour lui : « le tigre ne proclame pas sa tigritude, il bondit sur sa proie et la dévore ».
Ainsi donc, nous aurons souhaité écouter ce discours lors d’un sommet des chefs d’État de la CEDEAO ou de l’UA, pour marquer leur prise de conscience, à fin de s’organiser pour réactiver les démarches pour le Nouvel Ordre International (NOI) que l’occident a tout fait pour empêcher tout comme la pratique de la théorie “altermondialiste”. Il s’agit d’un ordre où l’Afrique devrait compter comme un des acteurs et non comme “le menu”. Il s’agit surtout de tout mettre en œuvre pour changer le modèle de la division internationale du travail imposée par les accords post-coloniaux tels que les accords ACP-CEE devenu UE.
Cela devient inquiétant de se rendre à l’évidence que les chefs d’État africains n’ont pas encore compris que le système des nations unies fait partie d’un ensemble qui a été mis en place après la colonisation pour assurer la domination de l’occident sur l’Afrique. Il s’agit d’un système violent et matérialiste fait de l’obéissance, de la soumission et des sanctions par des coups d’État ou parfois de guerres civiles pour tout contrevenant. Quiconque tente de porter atteinte aux intérêts de l’oligarchie occidentale, s’isole et devient une proie pour les faucons de l’impérialisme occidentale. Le principe est de tout mettre en œuvre pour perpétuer la dépendance économique en maintenant les pays africains dans un statut de producteurs des matières premières et consommateurs des produits finis. Dès lors,faire croire selon Faure Gnassingbé, que l’Afrique doit être perçue « comme un potentiel marché le plus fort, un terrain d’expérimentation pour le partenariat multipartite avec le secteur privé comme moteur du développement » relève d’une véritable illusion.
Le comble du paradoxe, ces quand le chef de l’État affirme fièrement du haut de la tribune des nations unies que, depuis quelques années, le Togo a opté pour le partenariat public-privé pour une économie stable, un État fort en collaboration avec le secteur privé et la société civile.
Si oui, nous sommes en droit de savoir, comment explique-t-on les échecs du DSRP, de la SCAPE et surtout du PND. De même, où en est-on avec les conclusions des différents FOPAT 2023 quand on sait que de 2008 à ce jour, la contribution du secteur primaire surtout l’agriculture pour le compte du PIB a baissé 40 à 28% ? Pour un observateur averti de la situation politique du Togo et de l’Afrique depuis les indépendances, des pays tombés dans l’obscurantisme politique, caractérisé par la pratique de « la liturgie du sang et de la violence comme culture politique », il ne peut que rester sas voix face à cette myopie politique affichée par les dirigeants africains.
En effet, quand il s’agit de faire des observations sur le fonctionnement des institutions de la gouvernance mondiale, ils voient très clair. Mais, quant à ce qui concerne la gouvernance de leur pays, ils deviennent aveugles. Comme le dit bien un proverbe kabyè : « BANAA BEINDOU », comme quoi, l’arbre ne voit pas ce qui se passe sous lui.
Il y a quelques mois, nous avons fait des observations qui nous ont conduit à apporter la preuve que le Togo ressemble, point par point, à une république bananière dont toutes les institutions de l’État sont inféodées à un système de gouvernance d’un régime « militaire clanique à façade civile », qui se trouve aujourd’hui dans sa forme achevé de la monarchie parlementaire, avec l’adoption de la constitution de la 5e république.
Pour nous, le satisfecit affiché par le chef de l’État ces derniers temps, n’est pas une bonne chose. C’est plutôt un cache sexe malodorant qui ne garantit pas la sérénité et la sincérité, l’ouverture d’esprit pour un débat constructif. Ce qui va finalement obliger beaucoup à rester silencieux devant des vérités essentielles. La preuve est donnée par cette violence d’un autre âge, un acte barbare primitif infligé à un député du parlement de la CEDEAO.
En effet, se trouvant à Lomé dans le cadre d’une session délocalisée, le député sénégalais membre du parlement de la CEDEAO, Guy Marius Sagna a été molesté, frappé et traîné par terre comme un vulgaire malfrat avec son collègue du Togo Mme Adjamagbo Johnson en compagnie de plusieurs autres personnes, le dimanche 29 septembre 2024, dans un règlement de compte déguisé au cours d’une rencontre citoyenne pacifique. Ce qui nous rappelle les événements du 25 janvier 1993 à Fréau Jardin commis par les nervis du pouvoir dans le seul but d’imposer le pouvoir par la peur. . Ce qui engage directement la responsabilité du ministre de la sécurité et de la présidente de l’assemblée communautaire tous très proches du chef de l’Etat togolais.
Nous ne le dirons jamais assez, nous avons la conviction que la deuxième et surtout la troisième génération des chefs d’Etat africains ont trahi la vision des pères de l’indépendance des peuples africains.
En effet, l’Afrique a toujours été considérée comme la chasse gardée des pays européens. Ainsi, la France, malgré la réticence de ses partenaires européens, avait fait de l’association des anciennes colonies avec la CEE ( Communauté Économique Européenne) devenue UE, une condition de la réalisation du marché commun européen comme le souligne le préambule du traité de Rome. Et ceci sans le consentement de peuples de ces pays qu’elle qualifie de  » territoire d’outre-mer”.
C’est contre cette imposture que l’ancien président burkinabè Thomas Shankar s’est engagé à combattre à travers des actions qui ont fini par pousser à bout certaines de ces partenaires.
Ainsi, le 17 novembre 1986, en réponse à Thomas Shankar qui exprimait clairement son refus de la perpétuation des sacrifices du continent africain au service de l’occident, le président français d’alors, François Mitterrand affirma, en guise de sa compréhension de la justesse du combat de Sankara : « le moment est venu où vous devez vous-même développez votre économie à partir de vos ressources et de vos hommes ». Ce qui confirme la formule de Amadou Hampâté Bâ selon laquelle, on ne développe pas un peuple, c’est le peuple qui se développe lui-même. Malheureusement, certains chefs d’État africains francophones surtout de la troisième génération peinent à l’intégrer dans leur logiciel. Quel gâchis !

OURO-AKPO Tchagnao un, président du mouvement Lumière pour le Développement dans la paix ( LDP).

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