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Les bavures policières signalées ça et là en période de couvre-feu contre la propagation de la pandémie du Covid-19, font réagir les acteurs politiques et ceux de la société civile.

Dans un message en date du 16 Avril adressé aux Forces de Défense et de Sécurité, Mohamed Madi Djabakaté, s’insurge contre ces actes ignobles et inhumains de certains hommes en uniformes et les invite à accomplir leur mission dans le respect des normes des droits de l’homme.

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MESSAGE AUX COUSINS DU 16 AVRIL 2020

Chers Cousines et Cousins en Uniformes,

La maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) met à l’épreuve les sociétés, les gouvernements, les communautés et les individus. L’heure est à la solidarité et à la coopération afin de lutter contre le virus et d’atténuer les effets, souvent imprévus, des mesures visant à stopper la propagation du virus. Le respect des droits de l’homme dans tous les domaines, y compris les droits économiques et sociaux et les droits civils et politiques, sera indispensable au succès des mesures de santé publique. Ce n’est pas moi seul qui le pense.

Chers Cousins et Cousines Gendarmes, Policiers et Militaires,

Je m’adresse à vous ce jour avec des larmes aux yeux et beaucoup de colère que j’essaie d’étouffer. En d’autres circonstances, je me serai adressé à vos supérieurs hiérarchiques mais procéder ainsi viendrait à vous considérer comme des irresponsables. Car tout corps confondu, aucun d’entre vous n’est en deçà de l’âge de la majorité.
Je tiens tout de même à clarifier les choses. Je respecte et j’ai de l’admiration pour les attributions qui sont les vôtres dans notre pays mais cela ne m’empêche pas d’avoir du dédain pour la façon dont certains d’entre vous jouent leurs rôles. Au-delà des membres de ma famille qui sont en votre sein, j’ai beaucoup d’amis parmi vous et pour qui j’ai du respect et de l’admiration du fait de l’éthique qui est la leur lorsqu’ils assument leurs tâches.
Je parle d’amis et non de personnes à qui je trouverai des excuses pour dire qu’ils sont bons mais que le système ne leur permet pas d’agir convenablement. Je les appelle des amis parce que sans être du système, ils savent que je suis un citoyen au même titre qu’eux et qu’à chaque fois que j’aborde une question je le fais dans notre intérêt à tous en tant que citoyen. Me connaissant et lorsqu’ils vont débuter la lecture de ce message ils sauront qu’au bout du compte et s’il s’avérait qu’ils étaient impliqués dans les violations des droits humains rapportés durant cette période d’urgence sanitaire je serai amené à suspendre cette amitié qui nous lie.
Au nom du principe de la baïonnette intelligente, je ne pourrai pas pardonner tout ce qui arrive si les responsabilités ne sont pas engagées. Les uns et les autres sont désormais libres de répondre à mes appels si je les sollicite pour un problème de sécurité après avoir critiqué les actions du corps auquel ils appartiennent. Je continuerai par avoir les meilleurs rapports avec tous les policiers, gendarmes, militaires ou tout citoyen en uniforme qui fera son travail avec professionnalisme. Je ne céderais pas à cette excuse lamentable qui consiste à dire que ce sont des hommes qui parfois ont agi sur ordre ou ont exécuté des ordres sans forcément en être convaincus. Ma morale et mon éthique même si je ne suis pas un saint ne me permettent pas de me taire quand je vois des abus ou de l’injustice sur autrui. Toutefois je ne me prends pas pour le bon Samaritain.

Chers Cousins des Forces de Défense et de Sécurité,

Votre mission est noble mais peut se pervertir du moment où vous faites défaut de professionnalisme et n’avez aucun respect pour les citoyens qui sont vos principaux clients. Le professionnalisme suppose : tirer fierté de son travail et de ses réalisations ; faire preuve de compétence professionnelle et de maîtrise du sujet ; apporter à l’exécution de ses tâches la conscience et le souci d’efficacité voulus pour être en mesure d’honorer les engagements contractés, de tenir les délais impartis et d’obtenir les résultats escomptés ; agir pour des motifs professionnels plutôt que personnels ; persévérer face aux obstacles et aux difficultés ; garder son calme dans les situations de crise. Et il est difficile de dire que tous les éléments de la force pandémie se comportent de la sorte. Revenant au respect, il suppose : n’exercer contre personne de discrimination individuelle ou collective ; s’interroger sur ses propres préjugés et comportements de manière à se garder des réactions stéréotypées ; respecter la dignité de chacun. A tout moment où vous êtes en service, votre préoccupation première doit rester votre client : le citoyen togolais. C’est ce qu’on appelle le souci du client. Cela implique : considérer tous ceux auxquels est assurée la prestation de services comme des clients et chercher à voir les choses de leur point de vue ; établir et maintenir des partenariats productifs avec les clients en gagnant leur confiance et leur respect. C’est comme cela que doit être la relation entre les citoyens en uniforme et la population qu’ils sont censés protéger. Et non des chiens et des chats.

Chers membres des Forces de Défense et de Sécurité,

Le COVID 19 ou l’état d’urgence ne sont pas une opportunité ou un tremplin pour la violation des droits humains. La répression n’est aucunement une solution. La sensibilisation et la conscientisation restent les seules approches pour gagner cette guerre contre le COVID 19. Si nous pensons le contraire pourquoi ne pas lancer un mandat d’arrêt contre le virus ?
Votre mission dans le cadre de cette urgence sanitaire est d’être des acteurs de proximité ou des antennes relais de la sensibilisation aux défis liés à la pandémie du COVID19 et de diffuser les recommandations des autorités pour une réponse à l’urgence. Ne poser pas des actes qui peuvent pousser vos compatriotes à s’interroger sur votre nature humaine. La pandémie du COVID 19 représente à n’en pas douter une opportunité pour nos compatriotes en uniforme de se rapprocher de leurs concitoyens et non le contraire.
Les confinements, quarantaines et autres mesures semblables visant à contenir et combattre la propagation du COVID-19 doivent toujours être menées en stricte conformité avec les normes relatives aux droits de l’homme et de manière nécessaire et proportionnée au risque déterminé – mais même si elles le sont, elles peuvent avoir de graves répercussions sur la vie des populations. Selon Madame Bachelet, le COVID 19 « met nos sociétés à l’épreuve ; nous apprenons et nous nous adaptons tous à mesure que nous affrontons le virus. La dignité humaine et les droits de l’homme doivent être au cœur de ces efforts, et non pas être envisagés après coup ».
Pour pouvoir vous vanter après cette pandémie d’avoir contribué à son éradication en faisant votre part, il vous revient au niveau individuel de vous assurer que vos interventions étaient respectueuses des droits humains. Et que vous n’avez pas abusé du contexte des pouvoirs d’urgence pour vous livrer à des violations. Malheureusement pour le moment je ne peux que répondre par la positive quand j’entends les échos de la fille violée, de la maman battue ou le silence du jeune mort dans des conditions obscures. Toutefois, il n’est pas tard pour adopter les bonnes pratiques. Cela ne veut pas non plus dire qu’il faut fermer les yeux sur les violations déjà survenues.

Chers Cousines et Cousins de la Force Pandémie,

Certains d’entre vous font un travail remarquable dans le contexte actuel et depuis toujours. Je ne peux que les encourager à continuer par faire preuve de professionnalisme. Et c’est aussi l’occasion pour moi d’insister que même si je ne suis pas d’avis avec le couvre-feu qui pour moi est une réponse partielle, je n’encourage aucunement qui que ce soit à le violer.
Je tiens à rappeler aux uns et aux autres que les droits de l’homme permettent à l’individu de se définir et d’agir en toute indépendance, d’être autonome au sein du groupe dont il fait partie. Pour autant, l’individu n’est pas placé hors du groupe : c’est seulement dans le cadre de la communauté que le libre et plein développement de sa personnalité est possible. C’est pourquoi l’individu doit exercer ses libertés dans le respect des droits d’autrui, en particulier des plus vulnérables, et de manière à satisfaire aux justes exigences de la morale, de l’ordre public et du bien-être général dans une société. Ceci explique que même si chacun a, en principe, le droit de circuler librement, l’État a la possibilité de restreindre ou prohiber les déplacements pour éviter la propagation d’une épidémie telle que le coronavirus. Toutefois, l’état d’urgence sanitaire n’est pas un blanc-seing pour violer, tabasser ou tuer les contrevenants au couvre-feu.

Chers Cousines et Cousins,

L’état d’urgence est une mesure prise par un gouvernement en cas de péril imminent dans un pays. Certaines libertés fondamentales peuvent être restreintes, comme la liberté de circulation. Des circonstances exceptionnelles, extrêmes, imprévisibles, peuvent amener un État, sur un territoire donné, pour une durée déterminée, à une restriction des lois, réputées démocratiques, et jugées insuffisantes pour faire face à un danger public en cours ou imminent, contrairement aux normes de l’État de droit courant. Nous l’acceptons tous.
L’état d’urgence sanitaire est une mesure exceptionnelle pouvant être décidée en cas de catastrophe sanitaire, notamment d’épidémie, mettant en péril la santé de la population. Cet état d’urgence qui selon un décret, signé le 08 avril 2020 et en ma possession, est en vigueur depuis le 16 mars 2020 reste tout de même muet sur les sanctions applicables aux contrevenants et entretien un flou sur son applicabilité aux zones identifiées par les communications ministérielles ou à l’ensemble du territoire. Mais ce n’est pas une raison pour qu’un militaire, gendarme ou policier détermine la sanction applicable aux contrevenants. C’est le travail du législateur. Votre mission n’est aucunement de faire des victimes additionnelles en plus de celles occasionnées par le COVID 19.

Permettez-moi de plagier Aristote en vous invitant à la mesure dans l’exécution de vos missions. La mesure « c’est ce qui ne comporte, ni exagération, ni défaut ». Vous êtes avant tout des humains comme nous. Ne nous poussez pas à devenir ingrats à votre égard du fait des actes que certains d’entre vous posent et que vous couvrez au nom d’une solidarité à la PANURGE.

#Solidaritéspersonnelsoignantstg
#EnsembleNousVaincrons
#COVID19vsTOGO2020

Papa Khadidja
Votre Cousin

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